Il y a des choses que l’on trouve évidentes et pas d’autres. Sur le coup, oui, mais après non ou pas vraiment.
Ok vous devez vous dire à quoi rime cette phrase somme toute bancale, sans queue ni tête mais croyez moi ça vaut le coup.
Je recommence.
Cette info n’a pas pu vous échapper, je l’ai chantée sous tous les toits: j’ai 40 ans depuis l’année dernière, j’en suis fière, pas parce que c’est 40 et que la société y accole un tournant décisif, pas parce qu’on est sensé y vivre une crise existentielle – que j’espère ne jamais croiser dans ma vie. Ces 40 ans ont en leur sein 25 années que je ne pensais pas traverser. 25 ans sont passés, le temps aussi et j’en suis reconnaissante.
Le temps passe…
Quand il y a deux ans j’ai débarqué en urgence chez mes parents, j’ai tout de suite activé le mode sous-marin.
En effet, depuis que j’ai commencé à aller régulièrement au Cameroun, je fais tout pour croiser le moins de personnes possible. Je déteste les interactions humaines, ceci n’est plus un secret. J’évite encore plus les échanges creux avec leur lot d’exhibition de CV, de cartes de visites. Les conversations qui commencent par “qu’est ce que tu deviens?” “Tu es mariée?” “Tu as des enfants?” “Tu fais quoi dans la vie?” m’horripilent ÉNORMÉMENT. Et donc, j’évite de croiser les anciennes connaissances. En 2019, je n’avais pas réalisé qu’il n’y avait personne à éviter dans le quartier où j’ai grandi. J’ai pris la pleine mesure des choses quand l’année dernière, j’ai fait 2 mois pleins au Cameroun. Le quartier a changé… Si la femme que je suis aujourd’hui est restée bloquée dans les souvenirs de l’adolescente de 24ans, le quartier lui s’est métamorphosé. Soit les voisins sont partis, morts, ont vendu leur maison soit, j’ai tellement changé physiquement que les rares personnes que j’ai croisées ne m’ont pas reconnue, encore qu’à chaque fois, j’adoptais la posture de la fille qui n’est pas du coin.
Le temps passe et nous avec.
Ceci m’a appris qu’on vit d’une façon ou d’une autre dans le passé. A l’époque, l’identité remarquable qu’est la maison de mes parents suffisait à faire de nous, leurs enfants, les “stars” du quartier. Le nom de Nyobe était à lui seul une référence et aujourd’hui, il appartient au passé. Je ne suis guère nostalgique… Je dis juste que les choses ne sont pas statiques comme parfois on le pense. J’en parlais avec ma mère qui s’en désolait en disant qu’ils font partie des rares « autochtones » du quartier. J’ai bien vu quelle était sa tristesse de voir le quartier se repeupler, se redessiner faisant d’eux les dinosaures ou une espèce en voie de disparition.
Le temps passe et nous avec.
Ça l’est encore plus vrai si comme moi, vous ne sentez pas le poids de l’âge. L’autre disait que c’est juste un chiffre. C’est vrai! Mais la jeunesse éternelle de l’esprit ne saurait éluder l’implacable réalité de mon fils aîné qui aura 10 ans l’année prochaine ou de ma nièce devenue femme aujourd’hui. Dans mon esprit c’est hier que je les voyais faire leurs premiers pas.
Le temps passe et nous vivions dans le passé….
J’ai beaucoup lu ces derniers temps. J’ai réalisé que je me suis beaucoup éloigné de moi. De celle que j’ai construite, de ma nouvelle version de moi, une version améliorée toujours en construction. Oui pour parler comme mon DG Cédric, “ je me rends compte de plus en plus que je suis très souvent perdu…. Et même un peu éloigné. Il suffit de parler un peu à ceux qui nous entourent et on se rend rapidement compte que collectivement nous n’allons pas bien, mais masquons nos peines et nos difficultés par des sourires qui n’en sont pas, et que nous nous laissons simplement aller au lieu de vivre pleinement les instants, mais également de faire des pauses et de s’avouer que nous n’allons pas bien“…Oui aussi, qu’ “Il est facile de se laisser emporter par le flot de la vie et des événements qu’elle nous fait expérimenter. Il est également facile de se perdre dans ses occupations, ses pensées qui passent les unes après les autres, celles auxquelles on fait attention et celles qui ne restent dans notre mémoire que le temps d’une seconde. Il est plus évident que l’on ne croit, de se laisser submerger par les innombrables tournures des heures que nous vivons, de nos journées, de nos semaines et ainsi laisser s’enchaîner des mois, avant de se rendre compte que nous n’allons pas bien”…
Je me suis laissée emporter, aspirée par la vie, ma vie, sans m’en rendre compte, j’ai renoncé à la vie, ma vie… Je me suis éloignée, de ma version améliorée, de façon sournoise, je suis sortie du chemin sans m’en rendre compte et comme souvent ça arrive, un jour tout a pété, je me suis réveillée au milieu d’un chemin qui n’était pas le mien. Oui, je n’allais pas bien mais je riais et j’ai réussi à me mentir…
J’ai beaucoup lu dans mes moments de silence où je n’avais rien d’autre à faire que nourrir mon âme désespérément vide. J’ai fait ce qui me nourrit le plus car mon âme avait soif de se sustenter, de se retrouver. Et j’ai lu, oui je l’ai déjà dit ( au cas vous ne l’auriez pas percuté, je pense qu’en 2 mois, j’ai lu 12 livres, personnellement un record tant ma vitesse de lecture n’a d’égale que celle d’une limace quand on sait qu’à côté, j’ai un salaire à justifier)
Bref j’ai lu. Et mes yeux se sont enfin posés sur le Pouvoir du moment présent de Eckhart Tolle Enfin, après une éternité, parce que je me savais dans le brouillard et que j’avais perdu ma sérénité durement gagnée. Un ami, un mentor et pilier (le célèbre A.N) dans ma vie me faisait d’ailleurs remarquer que si une partie de ma maison est éclairée, c’est que le travail n’est pas achevé. En bien des points il a raison. Je me vante souvent d’être une warrior sur certains aspects de ma vie. J’en suis fière car ils me valent un port altier de ma tête, une stature de i tellement je me sais sereine… Pour d’autres, je perds facilement pied et un coup de vent m’emporte tel le foin des champs… Je digresse. Ceci n’est pas l’objet de notre affaire.
Dans mon brouillard, j’ai lu le pouvoir du moment présent, je l’ai marqué de mon passage. Dois-je encore m’étendre sur le fait que quand je lis, je commente, annote, surligne au stylo bleu ??? Non, tel n’est pas le sujet de cet article et de toute façon, ne me jugez pas et si tel est le cas, who cares? Not me for sure.
Il y a un passage qui m’a marqué tellement il sonne vrai en moi… « Lorsque vous vous souvenez du passé, vous ravivez une mémoire » et avec, les émotions qu’un incident a entraînées… Je ne sais pas pour vous, mais chez moi ça ne ment pas. Dès que ma mémoire se ravive, je revis tout le flot d’émotions, bien souvent négatives, au point où ça me mine et parfois ça me plombe une semaine entière. Et puis me revient un passage de The Art of the good life de Rolf Dobelli: “your happiness is determined by how you allocate your attention… The same life events (positive or negative) can influence your happiness strongly, weakly or not at all- depending on how much attention you give them”…
J’ai lu le Pouvoir du moment présent et j’ai compris… Qu’après une dispute, je restais dans la dispute des heures voire des semaines plus tard. Après une remarque désobligeante, je restais là à ruminer encore et encore attendant impatiemment l’heure de ma vengeance… Oui, je suis de type rancunière mais je me soigne. J’ai réalisé qu’une partie de mes problèmes venait du fait que je trimballe mes casseroles de port en port à chaque instant de ma vie en accordant de l’importance à des choses futiles qui n’ont de réel pouvoir que celui que je leur confère. Dans ce livre, il est dit que dans l’instant présent, les problèmes n’existent pas… Dit comme ça, ça parait ballot et dépourvu de sens. C’est ce que je me suis dit au début. Il est dit que ce qui compte c’est ICI et MAINTENANT. J’explique… Si votre patron vous a pris la tête à 8h… ça c’est passé à 8h; donc vous laissez ça là-bas… Là tout de suite, c’est vous en train d’envoyer un mail et vous devez focaliser votre énergie à réaliser cette activité. Là tout de suite, vous écrivez ce mail et s’il existe une frustration dans votre coeur ou votre tête, c’est UNIQUEMENT parce que votre esprit se balade, votre égo crie représaille mais dans l’instant, la vérité est que votre boss, n’est pas devant à vous faire des misères…
Si vous avez lu Ego is the enemy, vous savez où je veux en venir. De cette lecture, une des choses que j’ai retenue sinon la seule et principale, parce qu’elle me parle directement, c’est « get out of your head ». Personnellement, je suis pratiquement h24 en train de rejouer des scènes, mon ego qui bien souvent se sent lésé me ressort le replay de toutes mes répliques et actes manqués. Et c’est épuisant. C’est drainant. A côté de ça, il y a la vie et son lot de réalités à gérer où l’ego sait nous requinquer même quand on devrait juste laisser couler.
Et j’ai médité, histoire de matérialiser cet instant T, instant présent: Cet ici et maintenant. Un jour, j’ai décidé de “fuir” un environnement devenu trop pesant, trop lourd, trop anxiogène. J’avais besoin de me retrouver… avec moi, pour moi et grâce à moi…
Comme je le disais, j’ai beaucoup lu! (oui je sais, je me la ramène. Mais c’est la faute à mon ego, je n’ai pas pu résister 🤭🤭🤭)
Que ce soit, le pouvoir du moment présent, conversation avec Dieu, the Ego is the enemy ou The art of the Good Life, tous me ramènent à ici et maintenant. Se focaliser sur l’instant présent… je l’ai fait pendant ce qui s’avère être mon cadeau d’anniversaire à moi à Zanzibar.
Point d’ordinateur, point de responsabilité, point de drames encore moins d’urgence. Juste moi, le Ciel, le sable blanc et une immensité d’eau bleue à perte de vue… Ha il y avait aussi le soleil… qui m’a brûlée mais ça, c’est une autre histoire.
Ps: le père Noël est arrivé en avance… merci de garder les joyeux anniversaires pour le mois de Juillet 🙂
Merci de votre compréhension
La Direction
Regarder l’étendue bleue et ne voir que l’étendue bleue… Marcher pieds nus sur le sable chaud et se dire que c’est chaud, rire parce que je voulais mettre mes sandales et que j’ai la feignasse… Vivre l’instant présent, ses joies et expériences sans penser à ce qui s’est passé la veille, le mois d’avant ou aux dossiers que j’ai confiés à ma collègue ou l’instant d’avant. Être dans le présent et ne pas voir le temps s’écouler. Deviner quel arbre se cache derrière une odeur… Renifler une écorce, une feuille froissée et réaliser qu’il s’agit de la cannelle, de la vanille ou d’une autre espèce arboricole dont on ne connaît que le produit fini. Être dans le présent et s’émerveiller pour soi et pour les autres. Les seuls moments où je me suis envolée, c’est ceux durant lesquels j’ai pensé à mes amis et à mes enfants. Ils auraient apprécié et ils apprécieraient. Assurément tonton Zhervel aurait adoré nager avec les poissons et les dauphins, l’Archange aurait adoré voir les tortues ou les dauphins. Il se serait émerveillé. Chinaka aurait adoré voir son frère adorer et il aurait fini par adorer. Mes copines m’auraient demandé pourquoi diable je n’aime pas la plage mais pour finir…Ces instants, on les aurait vécus à fond.
Vivre l’instant présent, c’est faire un travail sur soi.
C’est décider de renoncer à soi, à son ego. C’est déconstruire tout ce que l’on tient pour acquis et de terriblement faux. J’ai appris que contrairement à ce qu’on croit, on est esclave de plein de choses dans nos vies. Tellement esclaves que l’on laisse ces choses nous posséder, nous déposséder, nous avilir et comme ça arrive très souvent, nous rendre dépendants…. On vit dans l’idolâtrie permanente caressant et entretenant des choses accessoires, élevant les autres et leurs actions ou non-actions sur des autels.
Mon séjour à Zanzibar m’a aidée à me rappeler que tout passe, rien n’est éternel et que de ce simple fait, il n’y a aucune gloire à s’accrocher à qui ou à quoi que ce soit… Tout passe et nous laisse orphelins. Au pays des crevettes, il y a cette expression qui recommande de “ne pas mettre les organes”…. En d’autres termes, il ne faut pas prendre les choses à cœur. Vivre l’instant présent, c’est vivre dans le détachement et renoncer volontairement, sans contrainte dans le lâcher prise…. Céder les pans de soi qui nous coulent dans le ciment dans lequel on s’enlise.
Le détachement, être là sans totalement être là, se donner sans s’enfoncer. Donner juste ce qu’il faut pour éviter d’y laisser la peau.
Le temps passe et nous avec…
J’ai pris du temps et beaucoup de plaisir à ne pas voir le temps qui passe à Zanzibar… Trop occupée à profiter et à m’émerveiller à chaque coin de rue. Trop occupée à apprendre et m’abreuver de l’histoire de l’autre. Zanzibar a été un comptoir commercial où l’on vendait également des êtres humains. Les lieux sont froids et vides, l’histoire glaçante et pourtant là aussi le temps a passé…Il nous a laissé des vestiges mais aussi le souvenir de nos morts, des ancêtres servant de bêtes de somme en Asie et en Angleterre.
Pour la petite histoire, les Zanzibari n’étaient pas esclaves. Ils étaient personnels de maison, chez les “maîtres” Omani qui eux étaient esclavagistes. Les esclaves venaient principalement du Congo, et des pays voisins.
Aller à la découverte des massaï, observer, humble et reconnaissante et apprendre que ce peuple boit parfois le sang des vaches. Oui oui oui, vous lisez bien. Ceci ne se fait que quand ils se retrouvent dans une zone où les ressources en eau sont rares. Et le sang est traité à des herbes avant d’être consommé.
J’ai pris plaisir à me défoncer aux calamars et poissons seules ressources halieutiques qui ne me valent pas des allergies sévères et je me suis délectée de Chapati….. Manger à Zanzibar ne coûte pas un bras… pourquoi donc faire la fine bouche.
Il y a de la beauté en toute chose pour qui veut bien les voir et vivre dans le passé nous fait rater tellement de présents…. Vous allez rire… J’ai travaillé 7 ans au WWF et je n’avais jamais vu de dauphins de ma vie et ce n’est pas faute de ne m’être jamais retrouvée en haute mer… grillée par le soleil de Satan… À Zanzibar, j’ai retrouvé mon âme d’enfant. J’ai été reconnaissante de voir des dauphins (à l’œil nu. Zhervel si tu me lis…). Ça paraissait irréel et pourtant, il n’y avait pas plus vrai. Des dauphins nager ensemble… profitant de cet instant… leur instant…
Depuis mon retour, je suis plus sereine, je continue de pratiquer la gratitude quotidienne, je chante, je danse et si d’aventure mon esprit s’égare, je me pose une seule question qui me remet tout de suite dans l’instant : qu’est ce que je fais là tout de suite, à ce moment précis? Cette question met fin à toute rêverie, à toute rumination… Cette question me met dans l’instant présent qui me fait chérir le simple fait de laver les assiettes là, ici et maintenant.
Le temps passe et nous avec…
Un jour, je ne serai plus là, je serai dépouillée de tout… de cette vie qui pèse, de ces choses futiles, de ces personnes que l’on croit indispensables mais qui remplissent les cimetières….
Le temps passe et avec lui tout passe…